Les ambitions allégoriques de la science-fiction la rapprochent parfois de la comptine enfantine : à force de dresser des symboles énormes, d’entonner la ritournelle de l’individu-révolté-contre-la-dictature-futuriste de service, nos explorateurs des lendemains retrouvent de temps en temps la tonalité des rengaines puériles. Parfois consciemment, tel Harlan Ellison, qui, dans Repens-toi, Arlequin, imagine un monde où tout est chronométré, où vos retards sont décomptés de votre existence. Un monde que vient perturber, par des lâchers de bonbons intempestifs, une figure de la liberté grimée en Arlequin. Anne Maro a-t-elle lu Ellison ? Son premier roman, en tout cas, ne trouve guère d’autre référence qui soit à la hauteur de son imaginaire, d’une cruauté tout enfantine. Solution terminale met en scène une dystopie – une tyrannie fictive et futuriste. En 2078, la Terre est régie par d’abominables élus cacochymes, dont on prolonge interminablement l’existence. Pour les servir, les jeunes, rebaptisés Utilitaires, et dont les noms ont été changés en matricules. De mystérieuses institutions, Conseil, Syndicats et Pyramide, garantissent la stabilité de cet ordre. Des Voltors surveillent le ciel, des Waches arrêtent les contrevenants… Le schéma ordinaire du roman dystopique voudrait que quelques individus se…
Alexis Brocas
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