Archivo de diciembre 2008

31
Dic
08

Décembre 31: fin d’année

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25
Dic
08

25 décembre: Noel chez les ours…

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20
Dic
08

20 décembre: arrivée d’un nouveau cochon à la collection

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INV-2008-1

Don: Philippe.

15
Dic
08

15 décembre: arrivée d’un nouvel ours à la collection

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Don: Evelyne, la Maman de l’Ourson

13
Dic
08

13 décembre: revue rue saint-ambroise

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09
Dic
08

9 décembre: le vampire patagon

Le vampire patagon

Le calendrier patagon célèbre la Fête du Pétrole le 13 décembre.
À cette date-là, il y a bien longtemps, quelque part dans les faubourgs de la ville australe de Comodoro Rivadavia, un chien errant, en grattant le sol pour y cacher un os, vit sortir des entrailles de la terre une épaisse bave noire. Non pas un jet d’excréments du Diable, mais d’hydrocarbures paraffinés. Au même moment, à quelques mètres du premier puits de pétrole (et l’on peut regretter que ce deuxième événement soit moins notoire), naissait Evaristo Robustiniano Torres, le plus brillant romancier de ce lointain Territoire National, lequel n’avait pas à cette époque le rang éminent de Province Fédérale. Certes, grâce au pétrole, Comodoro Rivadavia acquit sa richesse matérielle. Mais sa richesse spirituelle lui fut accordée par les romans d’Evaristo Robustiniano Torres, lequel eut le génie d’inventer Victricius. Celui-ci était au Comte Dracula ce que le nandou est à l’autruche et le puma au tigre : une espèce sud-américaine plus petite et moins agressive que le modèle classique. Les romans d’Evaristo Robustiniano Torres, fidèles aux derniers progrès de l’hématologie, racontaient des aventures moins sanglantes que sanguines.
En 1628, William Harvey fit la découverte de la circulation du sang chez les animaux et l’homme. En 1882, Metchnikov s’aperçut du rôle joué par les leucocytes dans la défense de l’organisme. Grâce à Victricius, la fiction surpassa la science. Evaristo Robustiniano Torres inventa un vampire dont les papilles pouvaient identifier, à partir d’une goutte extraite de la carotide de sa victime, la composition biochimique de son sang. En moins d’une minute, avec une étroite marge d’erreur, Victricius pouvait savoir ce que la science ne savait pas encore détailler si rapidement : la quantité de globules rouges, globules blancs, plaquettes, protides, urée, glucose, chlore, sodium, fer, calcium, phosphore, fibrine et lipides. Surtout de lipides.
L’Argentine était à cette époque un pays de vaches grasses, de gros bonshommes et de grosses bonnes femmes. Leurs viandes et leurs chairs se dandinaient à travers les deux millions de kilomètres carrés de la surface nationale, occupant de leurs excès de poids et de volume les vastes étendues solitaires. Les Argentins mangeaient alors, en moyenne, un kilo et demi de boeuf par jour, sans autre garniture que de maigres salades.

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Les viandes rouges aux abondantes protéines véhiculent également des lipides qui collent aux artères, provoquant ainsi des maladies coronariennes et cérébro-vasculaires. Rien d’étonnant à ce que les principales causes de mortalité, imputables à ce régime riche en mauvais cholestérol, fussent alors l’infarctus du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux.
Evaristo transforma en source d’inspiration ce problème de santé publique. Victricius ne suçait que le sang des personnes souffrant de surpoids. Si le taux de cholestérol sanguin était inférieur à deux mille milligrammes par litre, Victricius lâchait sa proie immédiatement. Pour les valeurs supérieures, la morsure d’inspection était suivie d’une morsure de purification à but non seulement alimentaire mais aussi thérapeutique.
La morsure du vampire traditionnel manque de précision. Guidée par le mal, elle ne cherche qu’à vider la victime de ses fluides vitaux pour la métamorphoser en vampire. La morsure de Victricius, en revanche, était hautement sélective. Guidée par le Souverain Bien de la Santé, elle absorbait des lipides. Rien que des lipides. Au réveil, la victime se trouvait légère, comme si elle avait ingéré non pas un kilo et demi de viande et d’abats, mais deux cent cinquante grammes de riz à la vapeur.
Victricius était un vampire du Nouveau Monde, débordant d’entregent et de bonté. Il ne ressemblait pas aux vampires du Vieux Monde, possédés par des pulsions destructrices. Refusant souvent des victimes sous-alimentées, il préférait jeter son dévolu sur quelque malheureuse brebis. Plutôt défaillir lui-même que faire défaillir autrui. Ce fut une trouvaille que d’imaginer Victricius du point de vue de l’hématologie, en dehors des canons du gore. Les vampires d’Evaristo Robustiniano Torres n’étaient plus les ambassadeurs du mal, mais des chevaliers blancs de la science, serviteurs zélés du progrès.

(El hombre de los sesos, «Microbios»).

Traduction: Bernardo Schiavetta




Autor/Auteur

DIEGO VECCHIO, Buenos Aires, 1969. Reside en Paris desde 1992.

Publicó "Historia calamitatum" (Buenos Aires, Paradiso, 2000), "Egocidio: Macedonio Fernández y la liquidación del yo" (Rosario, Beatriz Viterbo, 2003), "Microbios" (Rosario, Beatriz Viterbo, 2006) y "Osos" (Rosario, Beatriz Viterbo, 2010).

Contacto: dievecchio@gmail.com

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